Comment le déroulement physiologique de la naissance est sans cesse perturbé
L'accouchement en hôpital ou clinique s'accompagne d'une absence d'intimité, qui est pourtant un besoin fondamental de la femme (et de la femelle) qui accouche. Naturellement, celle-ci recherchera un espace clos, familier, pas trop grand, avec peu de lumière, de bruit et de monde autour d'elle. Elle a aussi besoin de connaître la personne qui va l'assister (ce qui n'est pas toujours possible) et c'est pourquoi le va et vient dans la salle de travail de personnes inconnues pratiquant des gestes intrusifs l'empêchent de se sentir rassurée.
Le déclenchement de l'accouchement au moyen d'une perfusion d'ocytocine synthétique est de plus en plus fréquent : 20,3 % en moyenne en 1998 (alors que l'OMS recommande un taux < à 10 %), contre 15,5 % en 1991, 10,4 % en 1981 et 8,5 % en 1972. Pourtant, selon l'avis même du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français, on observe en cas de déclenchement "des contractions plus intenses et douloureuses, une utilisation plus fréquente du forceps" et une augmentation "de plus de 50 % du risque de césarienne dans le cas d'un premier accouchement", ce qui en fait "un geste médical sans bénéfice médical prouvé". Le déclenchement c'est aussi et surtout plus de risque de souffrance foetale pour le bébé qui se trouve "expulsé" de l'utérus maternel sous l'intensité de contractions qu'il n'a pas lui-même déclenché.
La péridurale,
pratiquée dans 58 % des accouchements en France en 1998 n'a pas que des
avantages. Conséquence directe du déclenchement en raison de l'intensité
douloureuse des contractions qu'il provoque, elle a d'autres conséquences sur
le déroulement du travail. Elle oblige la femme à rester immobile et couchée,
ce qui empêche l'adoption de positions d'accouchement plus physiologiques ;
elle peut entraîner une chute importante des contractions, en terme de quantité
et de qualité ; et être à l'origine d'une baisse de tension. L'expulsion du
bébé peut être rendue difficile s'il s'engage mal dans un bassin dont la
mobilité est réduite et l'emploi de forceps ou ventouses sera plus fréquent si
les sensations ressenties par la maman sont trop diminuées au moment de la
poussée. Elle peut avoir des ratés (un seul côté endormi) et des effets secondaires
pour la maman (maux de tête invalidants). Pour finir, plusieurs études ont
montré un effet sur la capacité de succion du bébé qui peut avoir des
conséquences sur le démarrage de l'allaitement.
Selon une étude, sur 1 692 accouchements qui se sont déroulés entre 1991 et
1994, on obtenait :
|
Césariennes |
Episiotomies |
Forceps |
Allaitement |
Sans péridurale |
11,64 % |
15,06 % |
2,48 % |
75 % |
Avec péridurale |
24,87 % |
47,06 % |
16,04 % |
58 % |
La position d'accouchement
imposée en salle de travail : couchée sur le dos, les pieds relevés dans les
étriers est anti-physiologique. Elle oblige le bébé à "monter une
côte" pour sortir, faisant fi de la pesanteur qui favorise pourtant la
rotation de sa tête. Elle provoque douleurs dans les reins, le poids du bébé
pesant sur la colonne vertébrale de sa mère, et perturbe les échanges sanguins
et respiratoires vers l'utérus et le placenta augmentant ainsi le risque de
souffrance foetale. En situation physiologique, les femmes prennent des
positions tout à fait différentes (à quatre pattes, accroupie, assise soutenue
sous les bras, debout accrochée à une corde...) et ressentent le besoin de se
verticaliser au moment de l'expulsion.
En France, en moyenne, l'épisiotomie est pratiquée dans 60 % des accouchements (100 % dans certains établissements), contre 30 % en Angleterre et 6 % en Suède. L'OMS recommande un taux maximal de 20 %. Aucune étude n'a prouvée un effet bénéfique de l'épisiotomie sur les trois indications qui la justifient pourtant : prévention des déchirures du périnée -dont elle accroît au contraire la fréquence-, prévention des incontinences urinaires ou anales et des prolapsus (ou descentes d'organes). En revanche ses inconvénients sont nombreux : lors de l'accouchement, plus de pertes de sang ; à court terme en post-partum, plus de douleur limitant le choix de positions d'allaitement ; à long terme, risque de mauvaise cicatrisation et de lésions du sphincter anal, douleurs lors des rapports sexuels pouvant perdurer de long mois. Une déchirure spontanée du périnée survient rarement s'il a été préparé pendant la grossesse (par le yoga par exemple), s'il est massé pendant l'accouchement, si la mère prend prend une position qui lui est favorable et effectue les poussées sur des expirations contrôlées et non en bloquant sa respiration. Une déchirure spontanée est de toute façon préférable à une épisiotomie car elle saigne moins, cicatrise mieux et entraîne moins de séquelles et de douleurs post-partum.
1981 |
1995 |
1998 |
10,9 % |
15,9 % |
17,5 % |
Les taux de césarienne révélés par les trois enquêtes périnatales montrent bien l'hypermédicalisation croissante des accouchements en France :
Pourtant la césarienne n'est pas un accouchement banal, mais une intervention chirurgicale aux suites douloureuses, avec des risques de complication pour la mère et pour le bébé, qui laisse bien souvent un vécu personnel dramatique aux femmes qui l'ont subie. Trop souvent pratiquées d'office (2 fois sur 3) en cas de précédente césarienne, elle sont très souvent la conséquence des perturbations de la physiologie naturelle de l'accouchement et le résultat de protocoles médicaux qui ne prennent pas le temps de laisser les choses se faire.